Vers une écologie du pangénome bactérien:
Application aux gènes d'antibiorésistance

Les bactéries sont des micro-organismes unicellulaires, dont le génome est composé d’un seul chromosome circulaire. Elles se reproduisent de manière autonome par réplication pour créer deux bactéries soeurs dont le génome est théoriquement identique (il peut y avoir des accidents de réplication), il s’agit d’un mécanisme de transfert vertical de gènes. En outre, du matériel génétique peut être échangé entre bactéries par transfert horizontal de gènes. Ces transferts sont réalisés par différents mécanismes (conjugaison, transduction, transformation naturelle) qui jouent donc un rôle majeur dans les trajectoires évolutives des bactéries. Or les mécanismes de transfert horizontal impliquent souvent des éléments génétiques mobiles (MGEs) qui sont des entités aux trajectoires évolutives partiellement indépendantes de celles des bactéries. Il existe une grande diversité de MGEs, ils peuvent être des parasites des génomes bactériens, ou au contraire être porteurs de gènes de résistance, ils peuvent même être des parasites d’autres MGEs ou alors porter des gènes de défense anti-MGE. Comme on le voit donc, les MGEs ont développé une large diversité de stratégies dans leurs relations (parasitisme ou coopération) avec leurs hôtes mais aussi entre eux. L'abondance et la diversité des MGEs est caractéristique du génome accessoire des bactéries qui peut représenter plus de 80% de l’ensemble des gènes de certaines espèces, le pangénome.

Un défi majeur consiste donc à mieux comprendre la dynamique éco-évolutive des MGEs dans différents contextes écologiques. En effet, même si la puissance des approches génomiques peut maintenant décrire la structuration des pangénomes ainsi que la diversité et l’abondance des MGEs, les causes évolutives et les mécanismes qui en sont à l’origine nous échappent encore. Appréhender la dynamique des pangénomes nécessite alors le recours à un nouveau cadre conceptuel [Michael A. Brockhurst et al. “The Ecology and Evolution of Pangenomes”. In : Current Biology 29.20 (oct. 2019)].

L'objectif de mon travail de thèse est de permettre un saut qualitatif dans notre compréhension de la dynamique des MGEs. Pour cela je mobilise les concepts et les outils développés dans le domaine de l’écologie et relatifs à la dynamique de la biodiversité. Dans cette perspective, je considère que l’ensemble des MGEs présents dans une population bactérienne constitue une communauté. Dans ce cadre, le recours aux théories de la biodiversité (théorie des niches écologiques et théorie neutre de la biodiversité) devrait permettre d’évaluer la contribution relative de différents processus dans la dynamique des MGEs.

Enfin, dans mon travail de thèses, les outils que j'utilise principalement sont les modèles mathématiques de dynamiques des populations (modèles d'EDO, équations de Lotka-Volterra...) complétés par des approches simulatoires (C++,Python) et de l'analyse statistique (R).